Signalétique : un atout francilien menacé

Tellement lisible qu’elle a inspiré de nombreux systèmes à l’étranger, la signalétique des transports parisiens est bouleversée par Île-de-France Mobilités, pour un résultat médiocre et un moindre confort de lecture.

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Sans le savoir, nous partageons avec elle une partie de notre quotidien. La signalétique des transports dans le Val-de-Seine, que l’on retrouve sur l’ensemble du territoire métropolitain, a été progressivement mise en place par la RATP à partir de la fin des années 1990. Symbolique de ce grand chantier, une police de caractère sur mesure, le Parisine.

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Dans le même temps sont installés des logos qui signalent les différents modes de transport, véritables bouées que l’usager peut saisir dans l’océan d’une offre pléthorique de lignes et de modes différents. Ces formes et couleurs sont entrées dans notre mémoire visuelle : il suffit d’apercevoir le « A » rouge du RER sur une carte pour, en un coup d’œil, discerner de quoi il s’agit.

Morceler à défaut d’unifier

Anticipant la mise en place d’un système multimodal universel, RATP et SNCF ont réussi à rapprocher leurs systèmes puisque cette même signalétique se retrouve dans les RER C à E ainsi que dans les transiliens. Partant d’un objectif pourtant justifié, celui d’unifier la signalétique à l’échelle régionale, Île-de-France Mobilités rompt cette unité : exit les arrondis, les formes sont désormais mélangées, à l’inverse de ce qui se fait dans de nombreuses autres grandes villes.

Car ce système efficace est tellement lisible qu’on retrouve des signalétiques analogues ailleurs en France comme à l’étranger : Bruxelles ou Budapest en sont les exemples les plus explicites.

Un carré pas si carré

Île-de-France Mobilités, qui finance les nouveaux transports, entend donc apposer sa griffe sur la signalétique. C’est à l’autorité que l’on doit, d’ores et déjà, le passage du vert-jade au bleu-gris des nouveaux bus et nouvelles rames de métro, sur lesquels le logo Île-de-France Mobilités s’affiche en grand sur chaque porte.

La révision des logos de mode (Métro, Bus, RER, Tram, Transilien) n’est qu’une première étape, puisque dans les nouvelles cartes affichées dans l’ensemble du réseau, le Parisine est supprimé au profit d’un caractère générique qui n’est pas adapté à la signalétique, pour un confort de lecture nettement dégradé.

L’aspect « carré » du logo d’Île-de-France Mobilités se retrouve un peu partout dans les nouveaux éléments de signalétique, dont la cartographie. Cela explique les nouveaux plans de Paris au carré – ce qui n’a aucune logique – où les rapports entre les distances sont supprimés et où il est donc plus difficile de se repérer.

Double peine

Les premiers perdants sont d’ores et déjà les usagers, au premier rang desquels les malvoyants. C’est en effet à toujours plus d’accessibilité qu’étaient dédiés les travaux de signalétique depuis plus de 25 ans, comme le passage au Parisine Girouette pour les écrans des bus en 2014, qui a permis une meilleure lisibilité au loin.

Pourquoi vouloir modifier à tout prix un design qui fonctionne pourtant parfaitement, avec le coût financier que cela implique ? Les transports de Londres, qui au demeurant ont su se moderniser, ont-ils renoncé à leurs symboles, pourtant vieux de plusieurs dizaines d’années ? Non.

Mais ce système participe aussi de l’image de Paris et de l’Île-de-France à l’international. Comme à New York ou à Londres, ces formes et couleurs associées aux transports sont devenues hautement symboliques de notre région. Comme les viaducs des métros aériens ou les anciennes gares du Val-de-Seine font partie du patrimoine architectural du territoire, cette signalétique fait partie d’un patrimoine visuel qu’il nous appartient de préserver.

Serge Brière

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