Passoires thermiques : des annonces, peu d’effets

Le 25 août, les loyers des passoires thermiques sont gelés. Premier pas vers une isolation de ces logements, cette réforme incomplète prévoit aussi de nombreuses options pour y déroger.

Gel des loyers, interdiction de louer en 2025 ou 2028 : si la consommation énergétique de votre logement est notée F ou G, vous êtes concerné… sauf si un locataire est déjà en place, ou si votre diagnostic de performance énergétique (DPE) a été réalisé avant 2021 sur la base d’un calcul sur factures. Côté vente, l’audit énergétique censé être obligatoire à partir de septembre 2022 a été reporté à 2023, montrant si c’était encore nécessaire la difficulté de sa bonne application.

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Dans ce contexte, si les aides publiques proposées par l’État, GPSO et certaines communes du Val-de-Seine peuvent s’avérer utiles pour les maisons individuelles, largement minoritaires sur le territoire, elles sont clairement hors-sujet pour les immeubles en copropriété : aucune prime n’est notamment prévue pour le remplacement des fenêtres vétustes ni pour l’isolation par l’intérieur des murs de façade, qui sont très nettement la première cause de déperdition de chaleur et donc de consommation des logements concernés. Ces travaux importants mais relativement peu coûteux, qui ne font l’objet d’aucune incitation substantielle, n’ont pas non plus été suffisamment expliqués.

Consommer plus, produire plus

Le chauffage représente près d’un tiers de la consommation électrique des Français : en affirmant qu’il fallait produire plus, début 2022, l’exécutif a non seulement assumé son bilan médiocre en termes d’isolation mais s’est aussi projeté vers un avenir marqué par des économies insuffisantes et la consommation en hausse qui va avec. Et ce, dans un contexte de hausse du prix de l’énergie lié aux coûts du gaz mais aussi à ceux du nucléaire qui n’étaient précédemment pas provisionnés : traitement des déchets, prolongement de l’activité des centrales en fin de vie, construction d’EPR décidement très coûteux.

Cette réforme pourtant louable dédouane donc les gouvernants de leurs responsabilités en faisant peser le poids de l’ensemble des travaux sur des propriétaires qui n’en ont pas toujours les moyens. Elle pêche aussi par son ambiguïté : un propriétaire peut faire l’impasse sur l’isolation s’il se dote d’un dispositif de chauffage moins énergivore comme, par exemple, une pompe à chaleur. C’est sans doute le prix à payer pour une politique énergétique pilotée par EDF et Areva plus que par l’État.

Serge Brière

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« En Hiver, il ne fait pas plus de 19 degrés »

1300 euros par an. C’est, plus ou moins, ce que paient Michèle et son mari en chauffage collectif proratisé chaque année, pour un appartement de 60 mètres carrés à Boulogne-Billancourt : c’est le poste le plus élevé dans leurs charges locatives, et plus d’un tiers du total. Cette adhérente de Val-de-Seine Vert, que nous avons rencontrée, se plaint en outre du froid aux jours les plus rudes de l’hiver : « tous radiateurs allumés, il ne fait pas plus de 19 degrés dans les pièces de vie en février ».

Boulonnaise de longue date, la jeune retraitée a toujours trouvé en la matière un bailleur aux abonnés absents. « Depuis notre arrivée dans la résidence en 2006, ils nous affirment qu’ils changeront les fenêtres d’origine, mais ça n’a jamais été fait », explique-t-elle. À ce jour, le couple n’est éligible à aucune prime de l’État s’agissant de travaux d’isolation, qui nécessiteraient d’ailleurs l’accord du bailleur, la société Gecina. Les locataires ne peuvent rien, non plus, quant au remplacement de la chaudière qui fonctionne au gaz, énergie fossile dont le prix augmente — 20% du gaz consommé en France est importé de Russie. De fait, ces locataires boulonnais sortent du champ des aides proposées par la ville, et n’ont aucune autre option que de prendre leur mal en patience.

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