On parle souvent -à juste titre- de la pollution atmosphérique et de la dangerosité des autos en ville mais on évoque rarement leur pollution spatiale dans les villes denses.
Interpellé par un article du journal municipal de Boulogne Billancourt (BBI) de Mars 2024 sur le quartier «République – Point du Jour» (24.000 habitants) qui dénombrait 14 aires pour vélos (135 places) et 42 aires pour les 2 roues motorisés (242 places), nous avons voulu connaitre les chiffres pour les voitures en stationnement sur l’espace public.
à une question simple nous attendions une réponse simple des responsables du quartier, de la ville ou de GPSO. Après plusieurs relances, nous avons compris que personne ne connaissait la réponse ou, conspirationisme aidant, que l’on nous cachait l’horrible vérité.
En cherchant dans les opendatas locaux et nationaux, nous avons trouvé de nombreuses informations sur les parkings en ouvrage mais seulement un fichier incomplet sur les linéaires de stationnement sur voirie pour les communes de France. Pour Boulogne-Billancourt, ce fichier comprend 640 enregistrements pour plus de 1800 segments de voies publiques caractérisés par leurs coordonnées GPS . La fiabilité de ces données est limitée sachant que certains segments mesurent moins d’un mètre (sans doute pour garer des Dinky Toys) et qu’il n’est pas indiqué si la rue est à simple ou double stationnement.
Après ajustement, on arrive à environ 80 km de linéaires de stationnement dans Boulogne, soit 16.000 places de 5 mètres de long et 2,4 mètres de large.
Soit 24 hectares quasiment privatisés par les propriétaires de voitures – à 95% du temps immobiles- au détriment des autres usagers de l’espace public non construit, évalué à 60 hectares sur les 617 hectares de la ville, sans compter la partie de la chaussée réservée à l’usage quasi exclusif des autos et des camions.
Le « droit » d’occuper la chaussée
En fait, les données numériques de cet article sont approximatives faute de disposer d’informations officielles de GPSO et/ou de la ville sur le sujet.
Cette occupation de l’espace public n’est pratiquement pas évoquée dans les projets d’aménagement comme s’il constituait un droit absolu et immémorial des automobilistes à occuper la chaussée gratuitement ou moyennant une contribution dérisoire (~1 €/jour pour les résidents).
La réduction de cet espace laissé aux seules autos est nécessaire pour permettre la création de pistes cyclables remplaçant, sur les axes structurants ou les rues étroites, les seuls contre-sens cyclables.
L’espace public appartient à tous. La place allouée au stationnement d’un véhicule individuel, à vocation quasi privative, doit être mise à profit d’usages à vocation collective. À titre d’illustration, une place de stationnement occupée par une voiture immobile toute la journée profite à un seul usager, là où une aire de livraison verra une dizaine d’usagers par jour, une station Vélib’ une vingtaine d’usagers par jour, une terrasse une centaine…
C’est aussi permettre d’augmenter le nombre encore ridicule des parkings pour 2 roues. Élargir un trottoir, c’est rendre plus confortable la marche et l’usage des poussettes d’enfants, c’est sécuriser les sorties d’écoles …
Il est essentiel que nous insistions dans les instances de concertations et de décisions pour prendre en compte cet aspect négligé de l’occupation de l’espace public.
Remi Lescoeur
NB : au moment où nous mettons sous presse, le service « Mobilité » de GPSO nous donne une information précise d’octobre 2022 indiquant que le nombre de places de stationnement payant de Boulogne était de 11.161. Les places de livraison et PMR ne sont pas incluses dans ce décompte.
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Sorties de parkings
Certaines villes ont choisi de favoriser la réduction du stationnement en voirie en proposant un tarif de stationnement en ouvrage (parkings) nettement plus attractif pour les résidents qui abandonnent ainsi une place de l’espace public.
On pourrait aller plus loin en facturant la sortie des véhicules du parking en plus de l’abonnement. Cette mesure inciterait les usagers à ne pas utiliser leur véhicule quand ils n’en ont pas réellement besoin (pour aller chercher le pain…). Cette mesure réduirait grandement les petits déplacements en ville, notablement plus polluants pendant les premiers hectomètres.