La densification de la ville d’Issy-les-Moulineaux se poursuit à marche forcée, les choix effectués sont contestables, notamment en matière énergétique.
Sur l’emplacement du Centre National d’Etudes des Télécommunications, soit 3 ha d’un trapèze compris entre les rues du Général Leclerc, Horace Vernet, Victor Hugo et l’avenue de la République, la ville d’Issy-les-Moulineaux a prévu un programme immobilier important de 105 000 m2 (40 950 m2 pour 638 logements, 40 870 m2 de bureaux, 17 030 m2 de commerces et un cinéma ainsi que 6 270 m2 d’équipements publics : école de 10 classes, crèche de 60 berceaux, salle polyvalente et atelier de création numérique.
La ville est l’une des plus carencées en espaces verts de qualité de notre région, bien en dessous des préconisations de l’OMS (10 m2 par habitant à 15 minutes de marche à pied) et malgré cela, elle construit dès qu’une friche industrielle se crée, oubliant totalement de donner une meilleure respiration à ses concitoyens, obérant leur santé sur le long terme.
Une alimentation énergétique très onéreuse
La ZAC va être chauffée et refroidie par un système de géothermie locale dans la nappe phréatique de la Seine. On se demande dans ces conditions à quoi sert la Loi de Transition Énergétique pour une croissance verte. Certes, le projet thermique va utiliser une énergie renouvelable via une profusion de systèmes : 4 thermo-frigo-pompes (fluide dangereux en cas de fuite pour le réchauffement climatique), une unité de stockage de glace, deux tours aéro-réfrigérantes adiabatiques (bruits et danger de légionellose), récupération de chaleur d’un Data Center, équipé de puissants groupes électrogènes en cas de coupures de courant (bruits et pollution des diesels). Enfin, en secours, deux chaudières à gaz. Tout cela à proximité d’un incinérateur de dernière génération capable d’alimenter la ZAC avec une chaleur à bon marché et renouvelable…
Le bilan économique pour la ZAC est totalement désastreux. Pour les logements, le prix de vente TTC du MWh sera de 116 euros soit 60 % plus cher que pour des logements équivalents chauffés par de la géothermie, mais le pompon est obtenu pour le chauffage-réfrigération des bureaux et commerces avec 145-155 euros le MWh soit le double des prix constatés dans notre région.
Pourquoi avoir fait l’impasse sur la fourniture de chaleur par Isséane… réseau trop long et trop onéreux à établir. Peut-être, mais un prix du MWh de 70 euros aurait sur le long terme compensé le surcoût du réseau.
À tout cela s’ajoute l’attractivité du centre commercial et du cinéma en fin de semaine où il est prévu 20 000 visiteurs dans un secteur très dense et à la limite des capacités des transports collectifs…
Un développement insoutenable
Issy-les-Moulineaux s’enorgueillit d’être une ville moderne à la pointe de la technique mais la raison oublie souvent le cœur. En 40 ans, la ville a doublé sa population et a plus que doublé le nombre de salariés y travaillant. Un bel exemple de développement qui, dans l’immédiat, est célébré mais qui aura un revers de médaille avec une intensité d’habitation, une intensité de déplacements, une intensité d’utilisation des services publics et privés… avec une imprévision totale du futur en créant un peu partout des îlots de chaleur et des rues-canyons mal aérées. Les éco-quartiers ne sont éco que sur le papier et près de 20 000 habitants bénéficieront des avantages d’un bain de pieds voire plus quand la Seine débordera.
Est-il agréable de jouer les cassandres ? Non, car il y a un demain et même un après-demain et si nous voulons que notre espèce humaine puisse résister aux aléas climatiques, il faut rendre la ville résiliente… Cette résilience demandera pas mal de jus de cerveau mais est encore possible et puisque ce qui a été construit par l’homme peut être remanié par l’homme, gardons espoir !
Val de Seine Vert