De la paille ?… Pourtant ni meules dans la cour, ni balles roulant dans les allées, ni bouquet d’épis au-dessus des portes ! C’est bien cachées, soigneusement enfermées au creux de caissons en bois, que sont dissimulées 7 000 bottes de paille compressée.
Concevoir et construire un groupe scolaire entièrement en matériaux bio, de la structure au mobilier scolaire en passant par les sols et les draps (en fibre de bambou), un défi pour Sonia Cortesse (architecte mandataire) Bernard Dufournet (architecte associé) et Olivier Goujard (maître d’œuvre).
La paille est utilisée de longue date en matériau de construction sous forme de torchis ou de chaume mais c’est l’apparition de la technique de la « brique de paille » créée avec l’invention de la botteleuse au milieu du 19equi a favorisé le développement de cette technique d’isolation réservée jusqu’ici aux maisons individuelles. Pour un bâtiment public de 5 241 m2 c’est une réelle innovation.
Le groupe scolaire Louise Michel, situé dans le nouveau quartier du Fort, bâtiment de 2 étages accueille depuis la rentrée scolaire de septembre 2013 des enfants de maternelle et du primaire soit 14 classes et de nombreuses salles d’activités : bibliothèque, salle vidéo, restaurants, salle de sport etc. À cet ensemble est associé un boulodrome de 24 pistes (dont 8 couvertes) complété par un club house, un bar, des vestiaires etc.
Tous les bâtiments sont construits en ossature bois et isolation en paille ou laine de bois. La paille de blé compressée est un isolant thermique et phonique très performant. Les bottes de paille compressée, enfermées dans des caissons sont utilisées ici comme remplissage des murs extérieurs Les toitures et la dalle béton ont nécessité une isolation soit en laine de cellulose soit en laine de bois.
Sécurité incendie
Mais « paille » est souvent associé à… feu ! Comment répondre aux inquiétudes légitimes alors qu’aucune norme ne correspond à ce type de construction ? Impossible pour les laboratoires spécialistes de la sécurité incendie de se référer par analogie à d’autres techniques déjà utilisées. Une seule solution un test d’essai incendie en grandeur réelle. Ce qui fut fait par le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB).
Ce test financé pour 70 % par la région PACA et le PRIDES (réseaux d’entreprises de PACA) et 30 % sur les honoraires d’architectes et BET a maintenant valeur de référence. Il démontre que la paille compressée utilisée ainsi peut satisfaire le règlement de sécurité contre l’incendie relatif aux établissements recevant du public. Comme le précise Sonia Cortesse : « Nous souhaitions minimiser le recours à des matières issues de la pétrochimie, éviter les plastiques pour les freins-vapeur et pare-pluie. Le panneau de contreventement de l’ossature bois constitue le frein-vapeur (à l’intérieur) et le pare-pluie extérieur est un panneau de laine de bois comprimé. »
Conception bioclimatique
Cet ensemble inclut de larges ouvertures à la lumière et au soleil, des équipements techniques tels que chauffage direct par géothermie, pompes à chaleur, ventilation double-flux. Pour la joie des enfants – et leur sensibilisation à l’écologie — les descentes des eaux de pluie empruntent des chemins à l’air libre vers les bassins de récupération dans la cour. Elle est ensuite stockée pour le nettoyage, l’arrosage et les sanitaires du boulodrome. Peintures écologiques et sol en linoléum ont été privilégiés dans toute l’enceinte.
Le coût ? Supérieur de 15 % à celui d’une école classique. En optimisant le chauffage et l’électricité, la commune a fait un calcul sur 15 à 20 ans et espère que le coût de l’investissement soit absorbé par les frais minimum de fonctionnement. Mais bien au-delà, ce qui est en jeu c’est un bien être, une qualité de vie, la protection des enfants et du personnel.
Pour Sonia Cortesse « Ce type de projet « ouvre le champ » à d’autres maîtres d’ouvrage. Il y a actuellement une autre école en construction en bois et paille qui se réalise à Montreuil »…à suivre donc !
Nicole Matrand