Les nouvelles orientations dans la gestion des forêts domaniales menacent les équilibres écologiques et l’agrément des promeneurs urbains, le tout dans une certaine opacité.
Le contrat d’objectifs récemment signé entre l’ONF et l’État pour la période 2012-2016 comporte trois objectifs dits de « production et de préservation », « d’exigence de rentabilité » et « d’ambition sociale ». On ne commentera pas ici ce dernier volet, qui intervient sur fond d’une gestion des ressources humaines marquée ces dernières années à l’ONF par plusieurs vagues de suicides chez les forestiers.
Exigence de rentabilité
Le volet central du contrat d’objectifs énonce clairement la ligne directrice : il s’agit « d’accroître la rentabilité des activités de l’ONF notamment par l’augmentation de la production de bois ». Le volet dit de « production et de préservation » équilibre-t-il la priorité donnée à la rentabilité immédiate ? Non. La production prévaut clairement sur la préservation. Les objectifs de « prélèvements » (lisez : abattages d’arbres pour vente de bois) en forêt domaniale augmentent fortement. La « préservation » quant à elle concerne au mieux quelques massifs labellisés « d’exception ».
La situation en Ile-de-France…
Concernant les forêts d’Ile-de-France, l’ONF n’épargne pas les brochures sur papier glacé pour souligner leur rôle d’accueil du public, leurs enjeux patrimoniaux, sans oublier de vanter sa propre politique « d’écoute, d’information et de concertation ». La vérité est que même pour les plus petites des forêts périurbaines de notre région, l’accueil du public n’est au mieux considéré que comme un objectif parmi d’autres. S’applique là aussi une volonté de vendre à tout prix du bois, quel que soit l’impact sur l’environnement à proximité immédiate d’habitats urbains denses. Malgré aussi la faiblesse des bénéfices financiers réellement produits par les coupes, dès lors que sont abattus des arbres souvent jeunes et étant donné la très modeste dimension des massifs ainsi abîmés et la taille des parcelles concernées.
Lors du colloque ONF-Natureparif organisé le 4 octobre dernier à Paris, Guillaume Sainteny, directeur de la chaire du développement durable à l’école polytechnique, a rappelé que sur la base des différents modes de calculs utilisés pour chiffrer la valeur de la forêt (valeur en termes de récolte de bois, valeur de la biodiversité évaluée selon la méthode du consentement à payer, valeur de carbone, valeur de l’espace récréatif) et même hors valeur, non directement évaluée, pour la santé humaine, le total des valeurs non marchandes est plus élevé que celui des valeurs marchandes. En Ile-de-France particulièrement, l’objectif de rentabilité immédiate n’est pas adapté. Les petites forêts qui sont le poumon de la couronne parisienne n’ont pas vocation à fournir à un établissement public des recettes de poche, elles ont par contre une valeur non marchande et environnementale particulièrement précieuse.
… et à notre porte
Après des coupes rases déjà pratiquées en forêts de Meudon et Fausses-Reposes (voir notre article de février dernier), les nouvelles coupes annoncées au printemps pour Fausses-Reposes seraient prévues pour l’automne. Information chuchotée. Selon les promesses du directeur général de l’ONF le 4 octobre, l’ONF « ouvre portes et fenêtres » en toute transparence, spécialement en forêt périurbaine où tout projet ferait désormais l’objet d’une concertation. Aucune concertation n’a eu lieu à ce jour concernant Fausses-Reposes mais soyons vigilants, le directeur général de l’ONF n’a répondu à aucune des questions précises qui lui étaient posées concernant des coupes sans concertation dans d’autres massifs. Parmi d’autres projets détruisant dans une politique à courte vue l’environnement périurbain en Ile-de-France, veillons à ce que ne soit pas maintenue entre autres, à Chaville et Sèvres, la perspective d’un abattage systématique des châtaigniers dans la parcelle 133 de Fausses-Reposes.
Béatrice Buguet