Le projet de construction d’un complexe musical sur l’Île Seguin par le Conseil général des Hauts-de-Seine a fait l’objet d’une enquête publique qui a pris fin le 18 janvier dernier.
La création d’un complexe musical ne peut qu’être saluée tant pour la promotion de la culture musicale que de l’offre de spectacle proposée. Néanmoins l’association Val de Seine Vert souhaite faire les remarques suivantes.
Taille et coût de la future structure
En 2006, l’ancien maire de Boulogne-Billancourt, M. Fourcade, avait proposé la création d’une salle de musique contemporaine sous la forme d’un espace dit « Zénith ». Les avantages de ce projet étaient un coût de création d’environ de 15 millions d’euros et des coûts de fonctionnement peu élevés. Cette modestie permettait d’éviter la course au « gigantisme » dans la programmation musicale et d’accueillir des spectacles avec des faibles moyens. Tout était donc à échelle humaine. Désormais avec la Cité de la musique, on passe dans un modèle économique du type « grand projet ».
Le coût final de la Cité est estimé à 540 millions d’euros ! Il a été prévu de faire appel à un partenariat public privé. Ce mode de financement entraîne différentes conséquences financières et juridiques qui ne sont pas développées dans le dossier d’enquête.
Pour une information transparente des contribuables il aurait été important de connaître les indemnités en cas de retard de livraison, les clauses de remise du bâtiment à la fin du partenariat ou encore les conséquences en cas d’exercice déficitaire de la structure. Dernier point, il aurait été important d’indiquer de façon précise la consommation énergétique du bâtiment et les modalités d’usage d’éco-matériaux.
Étude de marché et fonctionnement
Une étude de marché aurait dû être jointe à cette enquête. Après la pénurie, une pléthore de structures va être présente sur un même marché. En effet si Paris et sa proche banlieue pouvaient manquer d’établissement de ce type. Désormais cela ne sera plus le cas avec le conservatoire de La Villette, la création de l’Arena à La Défense et la rénovation du Palais Omnisports de Bercy sans compter les projets d’utilisation du stade du Parc des Princes. Rien ne permet de voir si cela a été pris en compte.
Il est prévu que l’orchestre « L’Insula Orchestra » s’installe à demeure dans la cité. Cet orchestre symphonique spécialisé dans le classicisme ne va-t-il pas être la marque de la Cité empêchant par là même que d’autres orchestres puissent s’y produire ?
Transport en commun et accessibilité aux piétons et cyclistes
L’accès de l’île se fait actuellement par un pont situé en amont aboutissant à Meudon et deux autres donnant sur la rive de Boulogne-Billancourt. Les passerelles supplémentaires envisagées dans le projet ne seront construites qu’après l’achèvement du bâtiment et donc soumises aux aléas budgétaires du département des Hauts-de-Seine ou de la structure qui succédera à cette institution.
Or, tant sur la station de tramway T2 située à Meudon que sur les lignes de bus (171, 169, 179 ou 26) et de métro Pont de Sèvres ligne 9, le cheminement actuel menant à la future Cité peut dissuader les usagers des transports en commun.
Concernant la station du Grand Paris Express ligne 15, outre le caractère lointain de sa réalisation, la sortie « voyageurs » prévue au niveau de la pointe aval est éloignée de l’entrée de la Cité nécessitant par là même une rapide construction d’une des deux passerelles programmées à long terme. Une utilisation du bâtiment « Square com » en tant que sortie « voyageurs » aurait pu être envisagée mais cela n’a pas été le cas.
Dans ses plans d’aménagement de la tête du Pont de Sèvres, le conseil général aurait dû réfléchir à l’arrivée de cet équipement public pouvant drainer des milliers de spectateurs.
En termes de circulation douce, rien n’est prévu concernant l’usage du vélo à la différence de l’usage de la voiture pour laquelle il est prévu un parking de dimension très importante.
En conclusion, l’intérêt architectural de ce projet sera valorisé si le reste de l’île Seguin est aménagé de façon équilibrée et raisonnable c’est-à-dire sans bâtiment imposant verticalement ou horizontalement pouvant l’étouffer. Enfin, que se passera-t-il si le département des Hauts-de-Seine disparaît comme vient de l’annoncer l’actuel Premier Ministre ? La Cité sera-t-elle poursuivie par la nouvelle structure institutionnelle dénommée Métropole de Paris ?
Alain Mathioudakis