Hangar Y à Meudon, un rêve envolé

Le hangar Y, vestige de l’exposition universelle de 1878, a été installé en 1879 près du bassin hexagonal de Chalais,
point central de la Grande Perspective du château de Meudon, dessinée par Le Nôtre. Les associations locales rêvaient d’en faire un musée de l’aérostation, rêve évaporé avec sa quasi-privatisation par un industriel de l’événementiel.

Le hangar Y, en réfection

Le hangar Y, en réfection

En 1877 le colonel Charles Renard fonde l’Établissement central de l’aérostation militaire de Chalais-Meudon qui devient ainsi le premier laboratoire aéronautique au monde. Il demande au ministère de la Guerre à bénéficier d’un hangar pour construire et remiser ses ballons et récupére une partie de la galerie annexe des Machines Françaises de l’exposition universelle. Le 9 août 1884 le dirigeable «La France», construit par Charles Renard et Arthur Krebs dans le hangar, réalise au-dessus du plateau de Villacoublay le premier vol en circuit fermé au monde. En 1921 le hangar Y héberge les collections du musée de l’Air et reçoit le public, mais celles-ci déménagent au Bourget en 1977. Le hangar est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1981. Il fait partie, avec les abords du bassin de Chalais, du domaine de l’Etat et confié au ministère de la Culture.

 Le rêve des associations

Les associations de protection de l’environnement et de défense du patrimoine, l’association pour un Centre européen des ballons et dirigeables dont un des créateurs est Audoin Dollfus, aérostier célèbre, ont souhaité que l’Etat crée un musée de l’aérostation dans le hangar Y. Un site internet du ministère de la Culture, en association avec le musée de l’Air du Bourget, l’Aéro-club de France, le Centre européen des ballons et dirigeables et la mairie de Meudon présente cet espoir muséal jusqu’en 2018.

Historiquement et d’un point de vue patrimonial, cette idée de musée de l’aérostation était fondée, l’actuel maire de Meudon en était persuadé ayant accepté d’être le vice-président du Centre européen des ballons et dirigeables. Encore fallait-il mettre deux moteurs dans le projet, un moteur animé par une personnalité politique et un moteur financier. Les Hauts-de-Seine et la volonté départementale de faire de la vallée de la Seine une vallée de la culture était une possibilité à la fois politique et financière, d’autant que le hangar Y est situé près du ru d’Arthelon alimentant la Seine à 3 km et donc bassin versant du fleuve.

Colonel Renard, dirigeable à propulsion électrique

Colonel Renard, dirigeable à propulsion électrique

 Le rêve évaporé

En 2018, surgit un promoteur d’événements culturels, le mécène et président fondateur d’Art Explora, Frédéric Jousset, qui propose de rénover le hangar Y et de le transformer, ainsi que le parc de plus de 10 ha, en centre d’accueil pour des événements artistiques. Le bail emphytéotique a été signé par l’Etat le 4 mai 2021 pour 35 ans avec un loyer modulable de 100 000 euros par an.

Le projet en cours de réalisation prévoit d’aménager le hangar Y pour y accueillir jusqu’à 2500 personnes, un restaurant attenant occupant un des côtés du bassin hexagonal de Chalais pouvant accueillir 300 personnes en été grâce à une terrasse surplombant le bassin, un atelier proposant des découvertes scientifiques et artistiques pour les enfants, des bâtiments sanitaires. Le parc de 11 ha autour du bassin hexagonal recevra des œuvres artistiques que les visiteurs pourront admirer.

Bien que la rénovation du site de Chalais et du hangar Y était une urgence, ce projet artistique pose des questions environnementales : aucune enquête environnementale, entrée payante d’un domaine public, accès par transports en commun quasi inexistants (bus 169), parkings pour véhicules de 300 places dont 100 situées à 800 m près de l’étang de Meudon. L’architecte des bâtiments de France a donné son feu vert pour un parking sur la pelouse du Tapis vert en cas d’affluence. Ce domaine est celui de la forêt domaniale de Meudon qui en subira les conséquences écologiques.

La privatisation du domaine de Chalais par un mécène de l’art, qui a aussi investi les domaines nationaux de Chambord et Chantilly avec quelques déboires, laisse pantois les Meudonnais et les amoureux de la forêt qui craignent pour son avenir.

Michel Riottot

Share

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.


+ quatre = 12