Le projet de l’île Seguin devient enfin réalité, avec le lancement de la cité musicale sur la pointe aval et du pôle des arts plastiques et visuels sur la pointe amont.
La qualité de l’action culturelle ne pourra tirer pleinement profit de cette proximité géographique que si une « passerelle », non pas au sens physique mais figuré, existe entre ces deux équipements.
Pas seulement, comme le propose Pierre Christophe Baguet, par un effet de masse en alignant le long d’une rue d’autres offres culturelles comme une école du cirque, des salles de cinéma, la création numérique avec le « Cube », mais au travers d’un rapprochement entre les arts plastiques et l’art musical par des initiatives communes : autrement dit que ces deux équipements ne s’ignorent pas, que cette relation de voisinage soit l’occasion de faire un pas vers l’autre. Cela pourrait se faire par des spectacles incluant création plastique et art musical, ou des expositions pluridisciplinaires comme au Centre Georges Pompidou. Pour la cité musicale de l’Île Seguin, cela implique une architecture « ouverte » invitant à y pénétrer, et qu’en dehors des spectacles ce ne soit pas seulement les guichets qui soient ouverts — c’est malheureusement le cas aujourd’hui de l’Opéra Bastille, alors que le bâtiment au départ devait être aussi facilement accessible que l’était le Centre Pompidou ; pour des raisons de sécurité, cela ne fut pas réalisé. On peut se demander si ces mêmes raisons de sécurité ne limiteront pas rapidement l’accès à la toiture végétalisée de la Cité Musicale — …
Malgré les vicissitudes qui ont accompagné les projets de réaménagement de l’île Seguin depuis le départ de Renault, la dimension culturelle n’a pas été sacrifiée. Un enjeu qui accroît l’exigence d’une qualité architecturale permettant une bonne intégration tant avec le site qu’avec le reste de l’ensemble bâti.
L’idée d’une terrasse-toiture accessible et en continuité avec l’espace public au sol est intéressante.
À ce sujet, on peut citer un exemple réussi : la toiture de la salle philharmonique de Köln/Cologne en bordure du Rhin a permis au chevet de la cathédrale et du musée Ludwig de créer une place publique aménagée grâce au génie de Dani Karavan (Esplanade Charles de Gaulle à Nanterre, Grand Axe de Cergy…).
De même la qualité de l’acoustique intérieure est autant affaire de génie architectural que de celui des acousticiens comme à la salle Cortot, où se rejoignent beauté architecturale et qualité acoustique comparable à la résonance d’un violon. « La musique paraît plus belle aux oreilles de ceux qui l’écoutent et plus proche au cœur de ceux qui la font », affirmait Alfred Cortot.
Lionel Favier