La réforme du système de contrôle et d’expertise du nucléaire en fusionnant l’Institut de Recherches de Sureté Nucléaire (IRSN) et l’Autorité de Sécurité Nucléaire (ASN) sous la direction de cette dernière est une erreur et un mépris des citoyens.
L’inclusion de cette réforme dans la loi d’accélération du nucléaire n’a pas été soumise antérieurement à la réflexion de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques. C’est, pourtant l’Assemblée nationale et du Sénat qui avait créé en 2002 l’IRSN pour restaurer la confiance dans le nucléaire après Tchernobyl.
Ces deux organismes qui travaillent déjà ensemble n’ont pas les mêmes finalités ni les mêmes expertises. L’IRSN est un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial qui exerce, à l’exclusion de toute responsabilité d’exploitant nucléaire, des missions d’expertise et de recherche dans le domaine de la sécurité nucléaire mais aussi de la radioprotection. Il est placé sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement, de la défense, de l’énergie, de la recherche et de la santé. L’IRSN a en 2020, 1816 salariés et 438 stagiaires de recherche financés sur huit sites (Fontenay aux roses, Orsay-Saclay, Cherbourg, Cadarache…) pour un budget de 271 millions d’euros dont 40% consacrés à la recherche pure. 25% de ses activités sont effectuées à la demande de l’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) pour la surveillance des installations ionisantes.
L’ASN est une autorité administrative indépendante chargée du contrôle des activités nucléaires civiles en France, créée par la loi en 2006. Elle assure, au nom de l’État, le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection pour protéger les personnes et l’environnement. Elle contribue à l’élaboration de la réglementation, instruit l’ensemble des demandes d’autorisation individuelles des installations nucléaires, vérifie le respect des règles et des prescriptions auxquelles sont soumises les installations et activités entrant dans son champ de compétence, en disposant de pouvoirs de coercition et de sanction, rend compte de son activité auprès du Parlement, des parties prenantes et du public.
Elle a 519 salariés pour un budget d’environ 190 millions d’euros.
Contrôle et surveillance
Toutes les catastrophes nucléaires de Three Miles Island à Fukushima ont montré que
le système de contrôle et de surveillance conditionne la sécurité des installations. La croyance gouvernementale et des opérateurs du nucléaire que pour aller vite dans le développement prévu des 6 EPR il fallait simplifier au maximum les contrôles et procédures est de nature à faire perdre confiance aux citoyens. A tel point que les députés en première lecture ont rejeté cet amendement. Il persiste un doute quant à l’issue de cette réforme qui passera à nouveau devant une commission mixte paritaire début mai. Enfin, les agents des deux organismes sont très inquiets, les uns assurant le contrôle et la règlementation du nucléaire (ASN) et les autres (IRSN) l’expertise et la recherche au plus haut niveau, voient surtout l’inadéquation d’un organisme de 500 salariés prenant en charge un autre cinq fois plus important.
La Commission Nationale Déontologie et Alertes en Santé Publique et Environnement dans un rapport de
36 pages a estimé que l’organisation duale actuelle est satisfaisante sur le plan déontologique moyennant des renforcements sur la séparation du contrôle et de l’expertise, l’accroissement de la recherche et la transparence vis-à-vis de la société civile. Les citoyens ne veulent pas que l’on diminue les capacités de contrôle et d’expertise de notre pays pour répondre à des demandes industrielles non justifiées par une enquête indépendante et demande le maintien
de l’organisation duale actuelle.
Michel Riottot