Avis de Val de Seine Vert sur le réaménagement de la RD910 sur Sèvres et Chaville

Nous souhaitons tout d’abord souligner qu’il est regrettable que l’enquête ne prenne pas en compte le projet du département concernant l’échangeur du Pont de Sèvres. En effet, la cohérence de l’aménagement proposé dépendra, pour une part, de la façon dont ces deux projets seront connectés. La question se pose également entre Chaville et Viroflay, particulièrement en ce qui concerne les aménagements cyclables.

Nous notons également que les suggestions faites durant la concertation préalable ont été insuffisamment pris en compte par le département. Au point qu’en avril 2019 la ville de Sèvres a jugé utile d’écrire au préfet et au président du conseil départemental pour souligner les points d’amélioration possible. En septembre 2019, le conseil municipal de Sèvres unanime a également émis le vœu que le projet d’aménagement de la RD910 « soit complété par une étude de perméabilité des sols et qu’il identifie et prévoit des réouvertures, au moins partielles, à ciel ouvert d’eaux de la vallée du ru de Marivel ».

La question de la nature en ville

Le réchauffement climatique que nous connaissons doit nous conduire à développer la trame verte et bleue afin de lutter contre les îlots de chaleur et la perte de biodiversité. Force est de constater que ce n’est pas le cas dans le projet proposé. Si en réponse à la mission régionale d’autorité environnementale, le département a fini par admettre que le ru de Marivel est bien un cours d’eau, il s’empresse d’ajouter qu’étant canalisé et transformé en égout il n’y a pas lieu d’en tenir compte (« Un cours d’eau est recensé au niveau des aires d’étude retenues, le Ru du Marivel. Ce dernier est toutefois canalisé sous la RD910 et ne présente donc pas un enjeu particulier. ») Ce n’est pas notre avis et comme les élus de la ville de Sèvres nous souhaitons que le projet prévoit des réouvertures à ciel ouvert. D’une façon générale, il faut travailler à la désimperméabilisation des sols et cela n’apparaît pas dans le projet proposé. Tout au plus est-il concédé que des études ultérieures pourront s’en préoccuper.

Pas un mot non plus sur la trame brune, garante de la vie du sous-sol. Pire, le projet du département prévoit l’abatage de 284 arbres (sur 319) alors que ce sont leurs racines qui sont garantes de la vitalité de ce sous-sol.

La mission régionale d’autorité environnementale recommande d’analyser l’abatage de ces 284 arbres au regard des enjeux de la biodiversité, nous y souscrivons et ne pouvons nous contenter de la réponse du département qui se limite à indiquer que 378 arbres supplémentaires seront plantés. En effet, il faut considérer que l’effet bénéfique d’un arbre sur son environnement dépend pour beaucoup de son âge. Cent nouveaux arbres sont équivalents à un grand platane actuel. De la pointe de Chaville au Puits sans Vin, les platanes font 30 m de haut en moyenne, donnent une ombre de 220 m2 et ont un volume de feuillage d’environ 3 300 m2. Ce sont eux qui évitent la surchauffe de la route, des trottoirs et des immeubles. Grâce à l’évapotranspiration ils ont un effet climatiseur dont nos villes ont absolument besoin dès aujourd’hui. De plus, les grands arbres captent plus de CO2 et fixent mieux les poussières, il est donc prévisible que l’abattage de 284 arbres nuise à la qualité de l’air. Les émissions de particules et de dioxyde d’azote le long de la RD910, qui s’étalent de part et d’autre de la voie sur les logements, dépassent les seuils moyens préconisés par la réglementation française (voir les cartes annuelles Airparif)…Près de 10 000 Franciliens décèdent prématurément de la mauvaise qualité de l’air et les épisodes asthmatiques chez les jeunes enfants explosent, les pneumologues sont très inquiets. L’étude Air Santé présentée dans le dossier conclut qu’il n’y aura pas d’impact de l’aménagement car le trafic routier reste stable. Nous avons toutes les raisons d’en douter. De la même façon nous doutons des conclusions de l’étude phytosanitaire qui affirme que nombre de sujets sont malades. Une contre-expertise réalisée par un expert mandaté par l’association Chaville Environnement en juillet-août 2019 ne dénombre que cinq sujets malades sur l’ensemble des arbres d’alignement existants. Tous les autres doivent être protégés, comme le demande la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité.

La requalification de la voirie

Comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire lors de la concertation préalable de 2016, l’aménagement prévu par le département ne répond pas aux besoins exprimés par la population en matière de déplacements. 95 % du temps de vie d’un véhicule automobile léger se passent au repos, au garage ou le long d’un trottoir…de nouvelles conditions de déplacement doivent être privilégiées (autopartage, location, covoiturage…) En ce qui concerne les transports en commun, même s’il est prévu que les bus puissent s’arrêter en pleine voie, ce qui évite qu’ils n’aient à se réinsérer dans la circulation, il n’en reste pas moins qu’ils restent englués dans la circulation automobile. Nous sommes, pour notre part, partisans de la création d’une voie en site propre, dans chaque sens, sur l’ensemble du linéaire. C’est la seule façon d’obtenir un report modal significatif.

En ce qui concerne les déplacements des cyclistes, la solution retenue par le département ne nous semble pas non plus pertinente. Les pistes aménagées sur les trottoirs et dans les contre-allées conduiront les cyclistes à entrer inévitablement en conflit avec les piétons et les automobilistes. La vitesse moyenne d’un cycliste sur route est de 23 km/h, elle tombe à 10 km/h lorsque la piste qu’il emprunte tangente celle utilisée par d’autres usagers. Là encore, en l’état, le projet proposé ne favorise par le report modal que nous appelons de nos vœux. La solution alternative proposée par les associations La ville à vélo et Mieux se déplacer à bicyclette, qui consiste à implanter une piste cyclable bidirectionnelle au centre de la voie, nous semble beaucoup plus judicieuse.

En conclusion, Val de Seine Vert, association agréée au titre de la protection de l’environnement, souhaite que le projet de réaménagement de la RD910 soit réétudié et profondément remanié.

Pour l’association

Alain Mathioudakis

Président

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